Mobilité, stockage, autoconsommation : l’avis de l’Ademe sur la filière hydrogène

Dans une note publiée début avril, l’Ademe analyse et liste les opportunités offertes par la filière hydrogène pour la transition énergétique.

Stockage & flexibilité des réseaux

Baisse des émissions de gaz à effet de serre, sécurité d’approvisionnements, stabilité des coûts, indépendance énergétique, relocalisation des emplois… Si le développement des énergies renouvelables promet d’apporter de nombreux avantages, des solutions de stockage seront essentielles pour assurer leur flexibilité et la gestion des surplus de production.

Pour l’Ademe, l’hydrogène jouera un rôle de passerelle entre les réseaux électriques et les réseaux de gaz pour permettre de stocker de grandes quantités d’énergie renouvelables sur de longues périodes. Un stockage dit « intersaisonnier » destiné à équilibrer le réseau entre périodes excédentaires et déficitaires.

Alors que les batteries et autres solutions « court et moyen terme » devraient permettre un stockage de l’ordre d’un térawattheure par an, l’hydrogène pourrait permettre d’en stocker chaque année plusieurs dizaines dans les réseaux de gaz avec deux principales solutions : l’injection directe de l’hydrogène dans les réseaux gaziers, à hauteur de 6 % à 20 %, et la création de méthane de synthèse en combinant hydrogène et CO2. Un méthane qui pourrait à la fois servir l’industrie et le transport (GNV) et permettrait à la France de se convertir progressivement vers un gaz 100 % renouvelable d’ici à 2050.

A l’état brut, cet hydrogène vert pourrait également remplacer l’hydrogène d’origine fossile utilisé par l’industrie qui en consomme chaque année plus de 900.000 tonnes en France.

Un levier pour l’autoconsommation

Bâtiments, ilots ou villages isolés… L’hydrogène a également un rôle à jouer dans le domaine de l’autoconsommation où, une fois encore, il viendra compléter d’autres technologies telles que le stockage par batteries.

Pour l’Ademe, il s’agit de déployer des micro-réseaux propres sur des territoires dont la production électrique est dominée par les centrales thermiques fonctionnant au fioul, une technologie onéreuse et extrêmement polluante. Mariés aux énergies renouvelables, ces dispositifs de stockage hybrides associeraient deux systèmes complémentaires. Utilisées pour le stockage « court terme », les batteries se chargeraient lorsque l’électricité produite par les panneaux solaires est excédentaire. La chaine hydrogène assurerait de son côté un stockage complémentaire, comme une réserve « haute capacité » permettant à un territoire isolé d’être autonome en énergie sur plusieurs jours voire plusieurs semaines lorsque la production solaire et le stockage batterie ne sont pas suffisants. Un dispositif déjà expérimenté avec succès à La Nouvelle, un village isolé situé sur l’île de la Réunion, et qui permet à trois bâtiments d’être autonomes en énergie.

Mobilité : l’hydrogène complémentaire à l’électrique

Pour l’Ademe, technologies batteries et pile à combustible sont complémentaires dans le domaine de l’électromobilité.

L’hydrogène est ainsi à favoriser pour des usages sur lesquels les véhicules électriques à batteries ne sont pas en mesure de se positionner. L’Ademe prend notamment pour exemple les utilitaires destinés à la livraison, les camionnettes réfrigérées ou les véhicules d’entreprise de service à domicile, considérés comme des véhicules au trajet journalier important. A cela s’ajoute la problématique de la disponibilité car avec un délai de ravitaillement de seulement quelques minutes, l’hydrogène limite au maximum l’immobilisation des véhicules.

Quant à l’adoption des véhicules à hydrogène, l’Ademe en appelle aux collectivités pour compléter le bonus écologique par des mesures et réglementations favorables à la filière. Est notamment évoquée la mise en place de zones à circulation restreinte favorisant l’usage de véhicules « zéro émission ». Un essor qui dépend également des infrastructures en place. Sur ce point, l’agence nationale préconise la formation de clusters – des regroupements d’utilisateurs intéressés par l’acquisition de véhicules à hydrogène – pour justifier l’investissement dans une station.

L’Ademe avertit toutefois : dans le domaine de la mobilité, l’hydrogène n’a d’intérêt et d’impact sur le changement climatique que si sa production est issue d’une énergie d’origine renouvelable. A cela s’ajoute l’impact carbone lié au transport de l’hydrogène du site de distribution jusqu’à la station-service. Pour optimiser le bilan, des cycles courts – moins de 100 kilomètres -et une production locale sont préconisés.

Autre rappel important : le rendement de la filière hydrogène. De l’électricité primaire à l’électricité restituée, la fourchette se situe de 20 à 30 % seulement selon les applications contre 80 % pour le stockage par batteries. Dans le domaine de la mobilité, l’Ademe préconise ainsi de recourir au maximum aux véhicules à batteries et de limiter l’usage de l’hydrogène aux profils d’usage qui ne peuvent être couverts.

Un cadre réglementaire à créer

Inflammation ou explosion, la manipulation de l’hydrogène n’est pas sans risques et impose la connaissance et la maitrise des risques accidentels par la définition d’un cadre réglementaire. Pour l’Ademe, celui-ci devra reposer sur un travail conjoint entre l’administration, les centres techniques compétents et l’ensemble des acteurs concernés.

Crédits : Mercedes